Comme disait une chanson de la première moitié du XXème siècle à propos des baisers : Méfiez-vous des pêcheurs mesdemoiselles car il y a pêcheur et pécheur…
Je suis sûr que vous avez beaucoup de souvenirs des uns.
Ou des autres…
Je pense que nous aurons tous quelque chose à dire et à lire lundi…

Il y en a qui se servent d'un chien. C'est très efficace aussi mais je n'aime pas les bêtes. Il y en a qui s'installent devant un chevalet et peignent ce qu'ils voient. Très bien aussi, qui dit attroupement dit gentes damoiselles en promenade. Mais je dessine comme un pied.

J'ai trouvé autre chose : je me poste là et je pêche. L'inconvénient c'est que beaucoup d'hommes s'arrêtent, par curiosité, ceux qui pratiquent en vacances, malheureux de se retrouver en ville. Mais quelques femmes aussi qui traînent le long des berges leur ennui et leur solitude du dimanche après-midi.

Elles regardent d'abord sans oser m'adresser la parole alors je leur souris. Les plus hardies (celle que je préfère pour la suite) me demandent ce que je peux bien attraper dans ce fleuve réputé sale. Je parle d'ablettes et de goujons. Les plus timides me rendent juste mon sourire et c'est à moi d'embrayer vite avant qu'elles ne s'éloignent : je leur parle du temps qu'il fait,, des bienfaits d'une promenade au grand air, de cette magnifique vue sur Notre-Dame avec sa flêche indestructible "une merveille d'architecture, Mademoiselle, qui traversera les siècles sans aucun dommage et ni les bombes, ni les tempêtes, ni le feu n'en viendront jamais à bout " .

Quand les timides se détendent -pour les autres c'est plus rapide- ma technique est de leur proposer de leur prêter ma canne quelques instants, juste le temps de mettre ma main sur les leurs au prétexte de les aider à bien diriger le bouchon. Les timides frissonnent et rougissent, les autres gloussent.

Si par hasard la chance me sourit et qu'un poisson morde à ce moment, la joie leur fait perdre toutes leurs réserves, c'est gagné ! Si ce n'est pas le cas (le plus souvent),  j'ai d'autres cordes à mon arc (de lignes à ma canne), la friture peut nous amener aux préférences culinaires, avec restaurant à la clef, le fleuve à la nature, aux sports nautiques, aux vacances, et pourquoi pas un pique-nique sur l'herbe ? Bref la glace est rompue et ce n'est plus difficile d'arriver à mes fins  : l'ablette est ferrée, il n'y a plus qu'à la prendre dans l'épuisette, de la ramener à la maison et... de la passer à la casserole !!

Maman m'a dit que je pourrai garder la monnaie. Je vais la mettre avec celle de la semaine dernière. Mais pas dans ma tirelire parce que Robert va me la voler. Il veut toujours me prendre mes affaires. Maman dit que je dois lui prêter parce que c'est mon frère et qu'on est de la même famille. Mais les sous ce n'est pas pareil. j'attends d'en avoir assez pour m'acheter la dinky toy que j'ai vue dans la vitrine l'autre jour. Une ferrari rouge. Elle est si belle. Robert touche toujours à ma collection, il m'énerve. Moi je ne touche pas à ses soldats de plombs !

Je préfère Mathilde. Elle est gentille, elle me fait même plus de calins que Maman. Et puis elle, mes jouets ne l'intéressent pas du tout. Elle n'aime que ses disques à la noix. Dès que les parents ne sont pas là, car eux aussi ça les énerve, elle les met sur le gramophone et elle danse en faisant plein de manières parce qu'elle se regarde en même temps dans la grande glace du salon. L'autre jour j'ai bien vu qu'elle avait mis du rouge à lèvres et je lui ai dit. J'ai aussi reconnu le collier de Maman. Elle m'a dit que je ne devais pas le répêter aux parents et surtout pas à Robert qui est un cafteur. Elle m'a donné 1 franc que j'ai mis dans la cachette.

Maman m'a dit de me dépêcher de rapporter le pain pour le dîner. Nous dînons tôt car après mon Papa part pour son travail. Il est veilleur de nuit dans une usine. Les voleurs n'ont pas intérêt à se pointer : il est fort mon papa ! J'aime bien manger tôt car le goûter après l'école c'est juste un verre de lait et un petit-beurre. Je goûterais bien cette baguette mais je vais me prendre une torgnole... Le coup de la souris l'autre fois ça n'a pas marché, je m'en suis pris une et Robert a rigolé.

Après le dîner Maman nous met au lit, Robert et moi, mais pas Mathilde qui a le droit de veiller, déjà pour finir ses devoirs et pour lire ses livres d'amour idiots , c'est trop nul ! Mais moi je prends deux, trois voitures et je joue sous les draps, il ne fait pas tout à fait nuit avec le lampadaire de la rue derrière le volet. Robert risque pas de cafter puisqu'il fait pareil avec ses soldats.

Encore deux rues et six étages à pied et je vais manger, des lentilles et des saucisses je crois. Chic !

49ème devoir de Lakevio du Goût

Que fait-il ?
Qu’attend-elle ?
J’ai bien une idée, mais vous ?
Je saurai sans doute lundi ce que vous a inspiré ce tableau de Vettriano.
Oui, ces temps-ci j’explore l’œuvre de Vettriano.
Ah, j’allais oublier, j’aimerais que vous commenciez votre devoir par
« J’entrai dans le café de la jeunesse perdue »
Et le terminiez par « Mais enfin ! Babylone vous y étiez nue parmi les bananiers !

J'entrai dans le café de la jeunesse perdue ma chère Clémence, c'est ainsi que nous l'avions baptisé, parce que la clientèle était particulièrement âgée, nous aurions pu l'appeler "la maison de retraite" aussi. C'était toujours là que nous nous retrouvions au début, en octobre dernier.
C'est à ce moment qu'on commencé tous nos ennuis. Enfin surtout les miens. Bien sûr vous étiez belle et non dépourvue d'esprit et j'étais depuis longtemps solitaire, ma précédente aventure s'étant mal terminée. Elles se terminent toujours mal.

Vous m'avez souri et je suis tombé dans vos filets. Les femmes sont des sorcières qui vous envoûtent et causent votre perte.

Lorsque j'en ai eu assez de votre joli minois et de votre tendance à envahir toujours plus mon espace allant jusqu'à jeter certains de mes trésors : mes grimoires de magie, mes statuettes, quelques grigris, osant même les qualifier de "cochonneries attrape-poussière", j'ai compris que nous ne pourrions plus continuer.

C'est alors que vous avez sorti votre dernière carte : vous étiez enceinte. Quelle horreur ! Comment avez-vous osé sans me demander mon avis, qui d'ailleurs aurait été négatif !

C'est pourquoi, chère Clémence, Babylone comme je m'amusais à vous surnommer suite à un jeu érotique auquel nous nous livrions à nos débuts, je vous ai fait prendre cette boisson qui, si elle ne vous tue pas,  va vous faire dormir un bon moment. Et maintenant je vais extraire cet embryon répugnant de votre joli ventre. J'espère y arriver sans trop de dégâts. Je me suis beaucoup documenté. Si vous survivez vous vous en tirerez avec une petite cicatrice, ce n'est pas la mer à boire.

Je sais très bien quand cette créature a été conçue  :lors de notre voyage aux Antilles. Quelle idée stupide j'avais eu, je déteste la chaleur, je n'aime pas me baigner, ni rien de ce que l'on trouve sous ces latitudes. Et je sais très bien ce que vous m'objecteriez si vous n'étiez pas assommée par le produit que je vous ai fait boire : "Mais si vous ne vouliez pas d'enfant, pourquoi n'avoir pas fait attention comme les autres fois ?"

Pourquoi ? La touffeur de l'air, les parfums enivrants... et puis réfléchissez un peu voyons, je ne suis qu'un homme, mais enfin ! Babylone vous y étiez nue parmi les bananiers !

Mais que diable vient-elle d’apprendre ?
Cette toile qu’on pourrait croire de Hopper si cette impression de joie ne venait assurer qu’il ne pouvait avoir peinte vous inspire-t-elle ?
Si oui, il faudrait que vous y glissiez les mots :
- Amour.
- Sandwich.
- Lèvres.
- Téléphone.
- Besoin.
- Tournevis.
- Caleçon.
- Seins.
- Gare.
- Cheveux.
- Toilettes.

Hou là ! Gare à mon complet !  J'ai peur des tâches, il sort à peine de chez le teinturier ! Je sais qu'elle vient de manger un sandwich, ses lèvres en ont encore le goût... heu... thon mayonnaise sûrement... pour peu qu'elle en ait encore sur les doigts ..

Si j'avais su que mon coup de téléphone de tout-à-l'heure allait déclencher une telle démonstration d'amour ! Tout ça parce que je lui ai dit que je lui apporterai ce tournevis dont elle a urgemment besoin pour ouvrir la porte de ses toilettes bloquée, franchement c'est peu de choses pourtant.

Enfin ça me permettra de récupérer mon caleçon que j'ai oublié près de la douche. Une telle étourderie ne me ressemble pas mais j'étais obsédé par tous ces cheveux dans le bac à douche, elle est si peu soigneuse. Ma femme est tellement méticuleuse elle, une fée du logis. Bon, c'est vrai elle a maintenant du ventre et les seins qui tombent un peu, c'est pourquoi je m'autorise quelques accrocs, "il faut bien que le corps exulte" n'est-ce-pas comme disait Brel.

Et puis Chantal c'est si peu couteux : quelques pauvres fleurs, que je prélève discrètement dans le jardin, enveloppées dans un vulgaire papier et elle me saute au cou !

45ème devoir de Lakevio du Goût.

Ce couple me dit quelque chose, mais quoi ?
Et à vous ? Que dit il ?
Lundi on le saura sans doute…
Mais ce serait bien si vous y mettiez les mots :
- Moraux.
- Ensemble.
- Incapable.
- Avril.
- Fou.
- Muet.
- Cavalier.
- Genou.
- Claire.
- Conte.

- Claire ! Claire !

- Oui Monsieur le Conservateur ? Que se passe-t-il ?

-Ce qu'il se passe ? Où sont mes fermiers du Midwest ? Vous voulez me rendre fou ?

- Je ne comprends pas... Quelqu'un a remplacé le tableau par celui-ci avec des animaux, ils vont bien ensemble remarquez ...

- Claire, vous travaillez ici depuis avril, vous avez bien dû remarquer que chaque tableau est équipé d'un système d'alarme et qu'il y a que nous qui connaissons le code pour le désactiver, alors ne me racontez pas de conte ! Si le précédent tableau ne réapparait pas dans l'heure j'appellerai la Police.

- Oh non Monsieur, pas la Police ! Je vais tout vous dire : c'est mon neveu Alphonse qui a voulu faire une farce, le pauvre est sourd et muet mais a un véritable talent artistique, comme vous pouvez le constater, et il adore les animaux, il a seulement voulu se faire connaître puisque nous allons avoir le vernissage de l'exposition ce soir.

- Mais il n'a donc pas de scrupules moraux votre neveu ? C'est d'un cavalier de se conduire ainsi ! Où se trouvent mes fermiers ? Je veux mes fermiers, pas une ménagerie !

- Monsieur, il est absolument incapable de faire quelque chose de répréhensible, il a juste voulu saisir une opportunité . C'est un bon garçon !

- Une opportunité ? Mais vous vous fichez de moi ! Qu'il remette tout de suite le vrai tableau à sa place, c'est juste par égard pour son jeune âge et pour son infirmité que je ne porterai pas plainte mais vous , considérez que vous ne faites plus partie du personnel de ce musée, j'attends dès demain votre lettre de démission.

- Monsieur, je vous en supplie...je pensais que vous aviez de l'humour, j'aime tellement travailler ici !

- Inutile de vous traîner à genoux, relevez-vous bon sang ! Je vais y réfléchir mais je ne supporterai plus le moindre écart à l'avenir et je ne veux plus voir votre neveu traîner par ici. C'est bien compris ? Et je peux vous assurer que ces paysans qui - que ce soit sous forme humaine ou animale ont le même air revêche- n'auraient sûrement pas été aussi conciliants que moi face à une telle faute !

-Oui Monsieur, pardon,  merci.